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La chaufferie de la ZAC Matabiau Quai D'OC s'invite au conseil municipal de Toulouse

Les élus d'opposition ont profité du vote sur la cession du terrain du chemin Gramont à Toulouse Métropole pour interpeller les élus de la majorité sur le projet de chaufferie de la ZAC Matabiau. Maxime Le Texier, Pierre Lacaze et Antoine Maurice ont appelé la majorité à mettre en place une véritable concertation et posé au passage quelques questions pertinentes...

Pourquoi les nouveaux riverains concernés n'ont reçu aucune information alors que les anciens ont reçu un courrier pour les "rassurer" sur le fait que la chaufferie ne se ferait pas à côté de chez eux ? Quid des solutions alternatives ? ou encore pourquoi la chaufferie de la ZAC Matabiau n'a pas été prévue sur la ZAC Matabiau ? Des questions qui resteront sans réponse... D'esquive en esquive, le plaidoyer des élus de la majorité, une fois de plus, n'aboutit qu'à augmenter la défiance des riverains.

Sacha briand lors du conseil municipal de Toulouse du 9/11/22

La réponse de Sacha Briand

"Sauf erreur de ma part..."

Hors rappel de l'objet du vote et une petite pique à destination de ses collègues, nous retiendrons cette phrase : "Sauf erreur de ma part je crois même qu'il y a une enquête publique pour ce type d'opération, en tout cas une concertation et en toute hypothèse une concertation au niveau du quartier donc il faut aussi à un moment laisser le temps au temps"... deux possibilités : soit il n'est pas au courant, soit il est aussi stupéfait que les habitants à l'idée que ce projet pourrait passer en douce ?

Pierre Trautmann lors du conseil municipal de Toulouse du 9/11/22

La démonstration de Pierre Trautmann

"C'est un bon projet !"

M Trautmann, c'est le connaisseur en la matière, celui qui sait. Il va à nouveau patiemment énumérer les mêmes arguments sans tenir compte des objections déjà formulées à leur propos ni prendre la peine de répondre aux questions, sauf celles qui peuvent être détournées pour lui permettre d'asseoir un peu plus son point de vue.

Lire son intervention complète

"Je signale qu'il y a toute une série de chaufferies biomasses qui existent dans notre commune et notre agglomération. Il y a la chaufferie biomasse de Rangueil qui chauffe toute l'université de Rangueil sans aucun problème depuis 7 8 années, il y a une chaufferie qui est encore plus ancienne au CHU de Purpan qui chauffe tout l'ensemble immobilier de Purpan  sans aucun problème. Il y a une chaufferie qui a été décidée récemment à la ZAC de Jolimont qui n'a soulevé aucun problème, la ZAC du CEAT, il y a une chaufferie à Blagnac... Donc la chaufferie biomasse c'est quelque chose qui est recherché, qui est fait.

Alors effectivement nous avons rencontré quelques difficultés... lors des réunions que nous avons eues dans le quartier avec Maxime Boyer etc. donc on a essayé de trouver un terrain où il y  a moins d'habitations, je souhaiterais si on peut projeter les images des deux sites [...] voilà le site d'Atlanta, vous voyez la population qu'il y a avec le rayon de 200 m, il y a une déchetterie qui est en bas, il y a une casse de voiture, etc. Voilà le site d'Atlanta. Vous pouvez montrer l'autre site, celui sur lequel nous étions initialement, il est donc prêt de la gare Matabiau, vous voyez l'embranchement vers Matabiau, c'est le skate park qui est là et vous voyez que le nombre d'habitation était bien supérieur, c'est pour ça que, logiquement, nous avons cherché un site qui soit plus adapté et nous avons trouvé le site d'Atlanta et y a la discussion avec la commission de quartier qui va se faire sous l'égide de notre collègue Isabelle Ferrer, qui va se faire à l'avenir. Comme l'a dit Sacha Briand, ce n'est pas quelque chose qui va être signé du jour au lendemain. 

Par ailleurs, il y a effectivement une négociation qui a été faite avec différents opérateurs. Dont on ne connait pas encore le résultat pouisque les offres finales ont effectivement été remises mais on ne connait pas le résultat, mais ce que je sais c'est que les quatre opérateurs ont acccepté de réduire fortement d'un tiers la pollution alors que la norme exigeait une norme de 300mg de Nox par m3, tous les opérateurs sont descendus à 200 donc bien en dessous des normes.

Ensuite on parle de l'approvisionnement en bois, etc., effectivement l'ADEME exige que l'approvisionnement se fasse à partir de forêts qui sont situées à des distances réduites et, pour votre information, en été, y aura 1 camion qui viendra pour l'eau chaude sanitaire, en hiver, il y a 7 camions qui viendront par jour, à côté de ça on est à côté du périphérique où il y a 100000 véhicules par jour qui circulent tous les jours.

Ensuite vous monsieur Le texier vous dites est-ce qu'on peut pas prendre de l'énergie solaire, etc. comme ça a été fait à Vidailhan, en complément, on met de l'énergie solaire là-dedans, mais c'est tout à fair marginal, on met des panneaux solaires sur l'ensemble du terrain, mais je vous signale que cette chaufferie  biomasse, cette installation doit délivrer 60GWh par an, et la centrale photovoltaique, la ferme photovoltaique de l'oncopole qui fait 19ha est limitée à 20GWh/ an. Donc vous voyez bien que les surfaces disponibles sont sans aucune commune mesure pour répondre à ce besoin d'énergie à partir du solaire.

Effectivement nous allons donner toute les informations nécessaires, le mieux serait qu'on connaisse le lauréat de cette mise en concurrence parce que, lui même pourrait donner beaucoup plus et de meilleures explications que nous puisque ce dossier il n'est pas encore finalement décidé par ailleurs, pour l'information de la population, nous comptons aussi sur vous pour dire que c'est un très bon projet qu'il faut effectivement essayer de le mener à son terme."

Des parallèles douteux

"Je signale qu'il y a toute une série de chaufferies biomasses qui existent dans notre commune et notre agglomération. Il y a la chaufferie biomasse de Rangueil qui chauffe toute l'université de Rangueil sans aucun problème depuis 7 8 années, il y a une chaufferie qui est encore plus ancienne au CHU de Purpan qui chauffe tout l'ensemble immobilier de Purpan  sans aucun problème. Il y a une chaufferie qui a été décidée récemment à la ZAC de Jolimont qui n'a soulevé aucun problème, la ZAC du CEAT, il y a une chaufferie à Blagnac... Donc la chaufferie biomasse c'est quelque chose qui est recherché, qui est fait."

Pierre Trautmann

Une démonstration par la force de l'usage qui mérite d'être complétée. En effet, qu'y a-t-il de commun aux chaufferies biomasse de Rangueil qui chauffe Rangueil, de Purpan qui chauffe Purpan, de Blagnac qui chauffe Blagnac et de la ZAC du CEAT qui chauffera le CEAT ? On a fait un dessin pour vous aider à bien visualiser.

comparaison chaufferies biomasse zac matabiau et zac jolimont

Rappelons au passage que :

  • M Trautmann lui-même s'est battu pour faire en sorte que soient raccordés au réseau de chaleur du Mirail, les chaufferies biomasse de Purpan (2.5 MW*) et de Rangueil (800 KW*)... motif annoncé : éviter de brûler de la biomasse, notamment en été, quand on peut privilégier de la chaleur "fatale" pour éviter les émissions de GES et préserver cette ressource ! On vous renvoie à la présentation faite par M Trautmann lors du conseil métropolitain du 24 mars 2022 - délibération 5.5 aux environs de 2h33.
  • Concernant la chaufferie biomasse de Blagnac (1.7MW*) installée en zone industrielle, il faut savoir que celle-ci est venue en renfort pour étendre un réseau de chaleur qui a pour source principale la géothermie. Procédé vanté par M trautmann lui-même dans un publi-reportage au côté de Véolia
  • Concernant le projet de chaufferie pour la ZAC de Jolimont... impossible de trouver des détails précis sur le web (si vous en avez, merci de nous les envoyer). Quoiqu'il en soit, on peut présager une puissance aux alentours de 2 MW...

*chiffres récupérées sur les documents promotionnels des différentes installations. Si vous avez d'autres infos, merci de nous les transmettre.

Pour résumer, on peut observer que :

  • la chaufferie biomasse de 8MW prévue pour la ZAC Matabiau Quai d'Oc est au moins deux fois plus puissante que les chaufferies citées en référence = 2 fois plus de nuisance (sans compter la chaufferie d'appoint au gaz de 20MW, ni les chiffres utilisés par M Trautmann ce jour là qui laissent penser que le projet a été revu à la hausse...)
  • contrairement à ces chaufferies, celle-ci est prévue hors de la zone à desservir = la réaction des riverains était plus que prévisible. Tous les organismes qui travaillent de prés ou de loin sur ces questions, de l'ADEME au CEREMA, alertent sur le problème de l'acceptabilité de ces installations.

Bilan : nous pouvons donner raison à M Trautmann sur le fait que les chaufferies à biomasse, ça se fait oui mais ça ne se fait pas n'importe comment !


Des informations incomplètes et trompeuses

Les élus de Toulouse vont-ils parfois sur le terrain ou se contentent-ils de l'observer depuis Google Map ? Cela expliquerait pourquoi ils avaient pris les alentours du skatepark Ernest Renan pour une zone industrielle, les toîts des supermarchés et du centre d'art BBB pouvant prêter à confusion en effet. Aujourd'hui encore pour le secteur d'Atlanta, la vue du ciel projetée lors du conseil provient de Google Map. Datée du mois de janvier, elle ne fait pas apparaître la caserne de pompier construite entre temps. Ne sont pas non plus signalés le permis de construire accordés par la ville de Toulouse pour une résidence de 158 logements et son propre projet de Techno-centre... ni le fait que le reste de la zone reste à densifier...

Par ailleurs, le visuel délimite un périmètre de 200m autour du projet sans justifier à quoi correspond ce périmètre et laissant penser que les nuisances s'arrêteraient là. On vous renvoie aux diverses analyses de dispersion athmosphérique des polluants (incinérateur du mirail, de ginestou ou pollution au plomb de STCM) pour vérifier par vous-même le périmètre réel des retombées.

secteur d'atlanta vu du ciel janvier 2022
Centre de secours de Toulouse Atlanta
Caserne de pompier
Techno-centre
l'ambitieux projet de la ville conçu par TAA
Résidence de 158 logements
Permis de construire accordé à Green City

Conseil pour les aménageurs de territoire googlo-assistés : en basculant sur Google Street Map, vous avez une chance d'accéder à des prises de vue plus récentes. En outre ce service vous permet de remonter dans le temps ce qui est très pratique pour observer la pousse des arbres et constater objectivement qu'on n'est pas prés de voir trois arbrisseaux remplacer un bel arbre.

Fatigue ou mauvaise foi ?

Ensuite vous monsieur Le texier vous dites est-ce qu'on peut pas prendre de l'énergie solaire, etc. comme ça a été fait à Vidalhian, en complément, on met de l'énergie solaire là-dedans, mais c'est tout à fair marginal, on met des panneaux solaires sur l'ensemble du terrain, mais je vous signale que cette chaufferie  biomasse, cette installation doit délivrer 60GWh par an, et la centrale photovoltaique, la ferme photovoltaique de l'oncopole qui fait 19ha est limitée à 20GWh/ an. Donc vous voyez bien que les surfaces disponibles sont sans aucune commune mesure pour répondre à ce besoin d'énergie à partir du solaire.

Pierre Trautmann

Quand M Le Texier pose la question de l'existence de solutions alternatives, il cite à titre d'exemple les capteurs solaires de la chaufferie de Vidailhan... parfait, M Trautmann répondra donc exclusivement sur la question du solaire ! Il fallait oser...

On s'étonne de ne pas entendre un mot sur la géothermie dont M Trautmann semble être un fervent partisan. D'autant que si l'on en croit la note de cadrage sur la géothermie superficielle que vous pouvez retrouver dans les études préalables de l'appel d'offre, les avantages de cette solution semblent nombreux et le seul obstacle serait d'ordre économique... le choix de la biomasse serait donc un choix à l'économie, sans réelle ambition écologique contrairement à ce qui est annoncé ?

Et pour finir de rassurer les riverains, M Trautmann annonce que cette installation doit fournir 60GWH par an... 60GWH, c'est quasiment le double de ce qui était annoncé au départ (besoins identifiés pour un périmètre élargi : 35.7GWh), qui était déjà le double de ce qui serait strictement nécessaire pour la ZAC Matabiau Quai D'Oc (besoins identifiés pour un périmètre restreint : 17,9GWh). Un peu plus tôt dans son intervention, il évoque 7 camions par jour en hiver contre les 3 annoncés initialement... deux erreurs cohérentes d'affilées ? Le projet aurait-t-il été revu à la hausse ?

Jean Luc Moudenc parle de la culture de la peur

La conclusion de Jean-Luc Moudenc

La culture de la peur

Bien pour le moment, je crois aussi qu'il faut avancer parce qu'il y a aujourd'hui une culture de la peur dès qu'un projet est annoncé, ce n'est pas propre à Toulouse hein, c'est un réflexe général, le rôle des élus c'est d'informer, de concerter, d'ouvrir le dialogue, de faire de la pédagogie, mais à un moment d'avancer. D'ailleurs si on n'avance pas sur une réalisation de transition écologique et énergétique, vous serez ensuite les premiers à nous le reprocher. Donc j'entends aujourd'hui que vous voulez freiner. J'espère que cette attitude n'est que provisoire et mue par les bonnes raisons que vous avez évoqué.

Jean-Luc Moudenc

La culture de la peur ? On va feindre d'ignorer que ça pourrait être une vilaine tentative de décrédibiliser la mobilisation des habitants. La "culture de la peur" c'est l'arme stratégique utilisée par les politiques pour renforcer les dispositifs sécuritaires, ce n'est pas l'arme des mobilisations citoyennes. La contestation du projet de chaufferie biomasse de la ZAC Matabiau ne repose pas sur des peurs irrationnelles. Elle pose des questions légitimes. C'est l'absence de réponses cohérentes qui commence à faire peur.

Définition (Wikipedia) "La peur est une émotion ressentie en présence ou dans la perspective d'un danger ou d'une menace. Elle est un instinct de conservation provoqué par l'analyse du danger et elle permet au sujet de le fuir ou le combattre. Elle est également connue sous les termes de réponse combat-fuite [...]"

Peur des effets du changement climatique et de son accélération, peur de la pollution de l'air et de l'eau, peur de l'épuisement des ressources... Il y a malheureusement des peurs bien-fondées que les responsables politiques devraient partager avec leurs concitoyens au lieu de les amplifier :

  • En favorisant le secteur du BTP, pourtant responsable à lui seul d'une part considérable des GES, avec des projets d'infrastructures anachroniques qui versent dans le gigantisme et un urbanisme qui favorise les opérations de destruction de bâtiments qui auraient pu être rénovés et de construction tout en métal et béton,
  • En poussant à l'industrialisation des forêts à proximité avec un appétit croissant pour les déchets à brûler sans s'intéresser pour autant aux conditions d'exploitation ni à l'utilisation du bois d'oeuvre (part "vertueuse" de l'exploitation des plantations d'arbres en matière de stockage de CO2)....
  • En reprenant des raccourcis marketing stupides pour faire la promotion de leurs actions : le carbone étant l'élément de base de toute vie organique, Toulouse Zéro Carbone signifie concrètement une ville morte...,
  • En coupant des arbres aujourd'hui pour un projet de métro dont les premiers effets positifs se feront ressentir dans une centaine d'année...

Bref pour résumer, on a d'un côte des responsables politiques fiers de leur projets d'infrastructures censées aider à lutter contre le réchauffement climatique (avec des effets positifs à très long terme si tout se passe bien), de l'autre des habitants qui désespèrent de voir que les politiques publiques dégradent leur environnement au lieu de le préparer pour affronter au mieux les effets du réchauffement climatique qui se font déjà ressentir.

Un dernier exemple pour bien comprendre la différence entre ce qui fait peur et ce qui rassure : expliquer aux gens, comme le fait M Trautmann, qu'ils peuvent bien supporter quelques nuisances supplémentaires vu qu'ils vivent dans une zone déjà polluée par le passage quotidien de 100000 véhicules sur la rocade, ça n'est pas rassurant. Au contraire. Priver les habitants de tout espoir d'amélioration et s'étonner ensuite qu'ils aient peur, c'est pour le moins contradictoire... Non, ce qui serait rassurant, ce serait de voir que partant de ce constat, les responsables politiques s'appliquent à chercher des solutions pour améliorer la situation ? Parce que, apparemment, comme les chaufferies biomasse, ça se fait ça aussi :  Quel avenir pour les rocades en France ? (8mn)

Pour revenir au projet de chaufferie pour la ZAC Matabiau, la question que dervait se poser les élus, c'est pourquoi est-il ressenti comme une menace ? Sans doute parce qu'il est incohérent de bout en bout ?

  • S'il s'agit de créer un réseau de chaleur pour la ZAC Matabiau, les dispositifs de production de chaleur devraient être installés sur la ZAC Matabiau pour permettre au passage de limiter leur puissance aux besoins de la zone.
  • S'il s'agit de développer un réseau de chaleur pour le Nord de Toulouse ? Là, il faudrait commencer par vérifier la pertinence de cette idée aux vues du choix fait depuis des décennies d'encourager le tout électrique ; Identifier prioritairement les sources de chaleur fatale à exploiter ; et en dernier recours prévoir de petites unités de production de chaleur en renfort, petites pour disperser les sources de pollution et les positionner au plus près des zones bénéficiaires.

Vivement la concertation !!